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N° 13 – 19 mai 2021

Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d’autres dispositions législatives

La Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d’autres dispositions législatives Ouverture d'un site externe dans une nouvelle fenêtre (2021, c. 10; projet de loi no 69) a été adoptée le 25 mars 2021. La majorité de ses dispositions sont entrées en vigueur à la date de sa sanction, soit le 1er avril 2021.

Cette loi a apporté plusieurs changements qui concernent le milieu municipal, notamment, en ce qui a trait à la connaissance et à la protection du patrimoine immobilier ainsi qu’aux régimes d’entretien des bâtiments et de contrôle des démolitions. Les modifications touchent entre autres la Loi sur le patrimoine culturel (LPC), la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (LAU) ainsi que les chartes municipales des villes de Québec et Montréal.

Ce Muni-Express présente ces changements dans les sections suivantes :

Note : Ce Muni-Express a été mis à jour  pour intégrer les numéros d’articles correspondant à la version définitive de la Loi, mise en ligne le 8 juin 2021.

Inventaires du patrimoine

La LPC prévoit maintenant qu’une MRC doit adopter un inventaire des immeubles sur son territoire qui ont été construits avant 1940 et qui présentent une valeur patrimoniale (art. 120). Elle peut également y inclure des immeubles dont la construction est plus récente. En plus d’alimenter les connaissances sur le patrimoine immobilier, cet inventaire a des effets juridiques en matière de contrôle des démolitions et d’obligation d’entretien. La MRC doit le mettre à jour périodiquement. La LPC ne fixe pas de délai ou de fréquence à cette fin.

La ministre de la Culture et des Communications peut prescrire, par règlement, son mode de réalisation, de consignation et de diffusion. Il est possible qu’un inventaire déjà effectué par une MRC respecte d’ores et déjà ce futur règlement. Les MRC ont jusqu’au 1er avril 2026 pour le réaliser en fonction des dispositions prévues (Loi, art. 136).

Par ailleurs, il sera possible d’adopter ce premier inventaire par portion de territoire – une MRC pourrait par exemple le faire progressivement, une municipalité à la fois. Ceci permettrait de mettre fin au régime transitoire applicable au contrôle de la démolition des immeubles antérieurs à 1940 dans la municipalité visée (voir plus loin).

À compter du 1er avril 2026, la ministre pourra, par règlement, prolonger la période de construction visée par l’inventaire, c’est-à-dire obliger une MRC d’y inclure des bâtiments plus récents. Le cas échéant, elle pourra déterminer le délai de réalisation de la nouvelle portion de l’inventaire. Elle pourra également établir des mesures de protection applicables dans ce délai aux immeubles nouvellement visés.

Finalement, les municipalités locales exerçant certaines compétences de MRC sont responsables de réaliser l’inventaire pour leur territoire ou celui de l’agglomération dont elles sont la municipalité centrale, selon le cas.

Pouvoir de citation

Pouvoir des MRC

Les MRC ont maintenant un pouvoir de citation de biens patrimoniaux en vertu de la LPC, à l’instar des municipalités locales. Elles peuvent ainsi attribuer un statut légal de protection à un immeuble, un site et, lorsque la municipalité en est propriétaire, un document, un ensemble ou un objet. Les interventions sur le bien sont alors encadrées et doivent être autorisées par le conseil qui l’a cité, avec possibilité d’imposer des conditions. 

La Loi n’a pas changé la nature du pouvoir de citation municipal. Les ajustements suivants ont été apportés pour en préciser les modalités d’exercice par les MRC :

  • Avant de citer un bien, la MRC doit consulter son conseil régional du patrimoine. En conséquence, elle doit se doter d’un tel conseil si elle souhaite exercer son pouvoir de citation. Le comité consultatif en aménagement du territoire prévu par la LAU depuis mars 2021 peut jouer ce rôle (LPC, art. 117).
  • Lorsque la citation vise un site patrimonial, ce dernier doit être compris à l’intérieur d’une partie de territoire présentant un intérêt d’ordre historique, culturel, esthétique ou écologique déterminée dans le schéma d’aménagement et de développement (SAD) (LPC, art. 127). Le conseil peut également adopter une résolution indiquant son intention de modifier son SAD au cours de la séance où l’avis de motion du règlement de citation est donné (LPC, art. 132).
  • Même si un bien patrimonial est cité par la MRC, les demandes d’intervention sur celui-ci qui nécessitent une autorisation sont présentées à la municipalité locale (ex. rénovation ou agrandissement d’un immeuble). Si l’intervention est conforme à la réglementation d’urbanisme locale, cette dernière transmet alors à la MRC la demande de permis ou le préavis. Le conseil de la MRC peut autoriser ou non l’intervention et imposer des conditions. Avant de les imposer, le conseil prend l’avis du conseil régional du patrimoine. Une copie de la résolution détaillant ces conditions est transmise à la municipalité locale, qui agit comme interlocuteur pour le requérant. L’objectif de ces mesures est de faire en sorte que les citoyens désirant effectuer des travaux sur un immeuble s’adressent à un seul interlocuteur municipal, soit la municipalité locale.
  • Une MRC ne peut citer un bien patrimonial faisant déjà l’objet d’une citation par une municipalité locale, et vice-versa (LPC, art. 171.1).
  • Les municipalités locales qui exercent des compétences de MRC sur le territoire d’une agglomération peuvent citer des immeubles situés sur celui des municipalités liées.

Changements relatifs à la citation

Une municipalité locale pouvait auparavant établir un plan de conservation pour un bien patrimonial cité. Ce plan renfermait les orientations en vue de la préservation, de la réhabilitation et, le cas échéant, de la mise en valeur de ce bien en fonction de sa valeur patrimoniale et de ses éléments caractéristiques. Désormais, ces orientations n’ont plus à être spécifiées dans un plan de conservation, que le bien soit cité par une municipalité locale ou une MRC. 

Si le conseil d’une municipalité locale ou d’une MRC qui a cité un bien envisage d’abroger son règlement de citation, il doit aviser, au moins 90 jours avant de le faire, la MRC ou la municipalité locale sur le territoire de laquelle se trouve le bien patrimonial, selon le cas (LPC, art. 119). Ceci permet à cette dernière de citer le bien en remplacement de la citation abrogée. Un avis d’intention doit également être transmis au registraire du patrimoine culturel Ouverture d'un site externe dans une nouvelle fenêtre.

Par ailleurs, si la ministre de la Culture et des Communications décide de ne pas classer un immeuble ou un site (ex. après analyse d’une demande en ce sens), elle doit en aviser la municipalité locale, la MRC et, s’il y a lieu, la communauté métropolitaine où il se trouve (LPC, art. 36.1 et 178). Les municipalités pourront alors déterminer s’il y a lieu de le citer.

La Loi a introduit dans la LPC la notion d’ensemble patrimonial, qu’elle définit comme des documents ou des objets qui, rassemblés en une collection ou autrement, présentent un intérêt pour leur valeur archéologique, artistique, emblématique, ethnologique, historique, scientifique, sociale ou technologique. Il pourrait s’agir, notamment, d’un ensemble d’artéfacts ou une collection de livres, d’archives ou d’œuvres d’art. Une municipalité ou une MRC peut citer un tel ensemble si elle en est propriétaire.

Pouvoir d’ordonnance de la MRC

En complémentarité de leur pouvoir de citation, les MRC ont désormais un pouvoir d’ordonnance similaire à celui des municipalités locales (LPC, art. 148). 

Ainsi, lorsque le conseil de la MRC est d’avis qu’il existe une menace réelle ou appréhendée qu’un bien susceptible de présenter une valeur patrimoniale soit dégradé de manière non négligeable, il peut ordonner pour une période d’au plus 30 jours :

  • la fermeture d’un lieu ou n’en permettre l’accès qu’à certaines personnes ou conditions;
  • la cessation de travaux ou d’une activité ou la prise de mesures de sécurité particulières;
  • des fouilles archéologiques;
  • toute autre mesure qu’il estime nécessaire pour empêcher d’aggraver la menace pour le bien, en diminuer les effets ou l’éliminer. Il peut s’agir par exemple de protéger un immeuble contre la pluie ou d’installer des madriers pour soutenir un bâtiment susceptible de s’effondrer.

Acquisition et location d’un immeuble protégé

Avant l’entrée en vigueur de la Loi, une municipalité locale pouvait déjà acquérir un immeuble patrimonial cité ou situé dans un site patrimonial qu’elle a cité, et ce, de gré à gré ou par expropriation (LPC, art. 145). Dorénavant, une MRC peut également procéder à une telle acquisition. De plus, la LPC précise que les immeubles classés peuvent être acquis.

En outre, il est possible pour une municipalité de louer à toute personne, y compris une entreprise, un immeuble classé ou cité situé sur son territoire ou situé dans un site patrimonial qu’elle a cité, si elle en est propriétaire. Malgré la Loi sur l’interdiction de subventions municipales, la municipalité peut fixer le loyer à un coût inférieur à sa juste valeur marchande (LPC, art. 150.1). Ces dispositions visent à favoriser l’occupation des bâtiments patrimoniaux, ce qui peut contribuer à éviter leur détérioration.

Les revenus de location provenant d’un tel immeuble doivent être prioritairement employés à l’entretien nécessaire à la préservation de sa valeur patrimoniale et au respect des engagements financiers contractés par la municipalité à son égard (ex. le remboursement de l’emprunt ayant financé l’achat ou la restauration du bien). La municipalité tient également compte des frais d’administration qui s’y rapportent.

Remplacement des plans de conservation

La LPC prévoyait l’élaboration de plans de conservation pour les : 

  • immeubles et sites patrimoniaux classés (ancien art. 37, abrogé);
  • sites patrimoniaux déclarés (ancien art. 61, modifié);
  • immeubles et sites patrimoniaux cités (ancien art. 143, modifié);
  • paysages culturels désignés (art. 20).

Dans les trois premiers cas, il s’agissait de plans qui comprenaient les orientations de la ministre ou de la municipalité, selon le statut de l’immeuble ou du site, en vue de sa préservation, de sa réhabilitation et, le cas échéant, de sa mise en valeur en fonction de sa valeur patrimoniale et de ses éléments caractéristiques. La LPC ne prévoit plus l’élaboration de ces plans. 

Cependant, les plans de conservation établis par la ministre dans les deux premiers cas qui étaient en vigueur le 31 mars 2021 continuent de s’appliquer tant qu’ils n’ont pas été remplacés, selon des dispositions qui varient en fonction du statut du bien (Loi, art. 132).

Dans le quatrième cas, le plan de conservation s’inscrit dans un contexte différent et il est toujours prévu par la Loi.

Les paragraphes suivants donnent des indications pour chacun de ces quatre cas.

Immeubles et sites patrimoniaux classés

Dans le cas d’un immeuble classé et de son aire de protection, la Loi prévoit désormais certains éléments pouvant être considérés par la ministre lorsqu’elle analyse une demande relative à la délivrance d’une autorisation pour un acte donné (LPC, art. 53.4 et 53.5). Il s’agit par exemple de l’effet de l’acte sur l’intégrité et l’authenticité du bien et sur le contexte environnant de l’immeuble. Elle peut considérer d’autres éléments.

Dans le cas d’un site patrimonial classé, la LPC prévoit également certains éléments pouvant être considérés, qui sont différents de ceux d’un immeuble classé (art. 67.2). Il s’agit par exemple de l’effet de l’acte sur les éléments caractéristiques du site, dont le cadre naturel, le réseau viaire, le système parcellaire, le cadre bâti, les unités de paysage et les qualités visuelles.

De plus, des objectifs de conservation seront établis en association avec une nouvelle catégorisation des immeubles et sites patrimoniaux classés (LPC, art. 11.1 et 11.4).

Sites patrimoniaux déclarés

Dans le cas d’un site patrimonial déclaré, le gouvernement peut prendre un règlement qui encadre les actes pouvant y être faits. Ceux-ci peuvent être interdits, soumis à des conditions ou exemptés de l’obligation d’être autorisés. Les dispositions d’un tel règlement peuvent varier selon les immeubles ou les parties de territoire auxquels elles s’appliquent. Le règlement est soumis pour consultation, avant son édiction, à la municipalité locale et à la MRC sur le territoire où se trouve le site. Un règlement distinct devrait être élaboré pour chacun des sites patrimoniaux déclarés, étant donné leur contexte différent. Ainsi, certaines règles devant être respectées par les propriétaires des immeubles compris dans le site seront plus prévisibles et transparentes.

Ces règlements du gouvernement sont de nature à viser des objets déjà encadrés par la réglementation municipale d’urbanisme, notamment, ceux de zonage sur les plans d’implantation et d’intégration architecturale. Les dispositions du règlement municipal continuent de s’appliquer. Pour effectuer l’intervention projetée, le demandeur devra obtenir à la fois l’autorisation de sa municipalité locale et celle de la ministre. Ainsi, la règle la plus sévère sur un objet donné s’appliquera.

Le pouvoir d’autorisation de la ministre est discrétionnaire et s’exerce au cas par cas tout en étant encadré par un règlement gouvernemental, le cas échéant. Pour analyser les demandes d’autorisation, certains éléments pouvant être considérés sont alors les mêmes que pour les sites patrimoniaux classés (LPC, art. 67.2). Aux fins de l’analyse des demandes, elle établit une directive visant à déterminer ses orientations concernant l’application des éléments qui peuvent être considérés pour chacun des sites patrimoniaux déclarés (LPC, art. 61). Elle pourra par exemple y définir des éléments qui ne sont pas expressément énumérés dans la Loi et qui peuvent être considérés lors d’une demande d’autorisation ou préciser comment elle entend les appliquer. Avant d’établir une directive ou de la mettre à jour, elle doit consulter toute municipalité locale sur le territoire où le site patrimonial est situé (LPC, art. 62).

Les plans de conservation existants, qui ont été l’objet d’importantes démarches de consultation, doivent être pris en considération lors de l’élaboration du premier règlement et de la première directive pour les sites patrimoniaux déclarés concernés (art. 133 de la Loi).

Par ailleurs, la ministre peut déterminer des conditions relatives à tout acte qui n’est pas visé par le règlement ou pour lequel le règlement ne détermine pas toutes les conditions de réalisation (LPC, art. 66).

Finalement, en vertu des articles 179.1 et suivants de la LPC, la Ville de Québec et la Ville de Montréal exercent certains des pouvoirs de la ministre concernant l’autorisation de certains projets dans des sites patrimoniaux déclarés. À cette fin, la LPC prévoit dorénavant qu’elles sont liées par tout règlement du gouvernement visant ces sites, ainsi que par toute directive établie par la ministre à cet égard.

Immeubles et sites patrimoniaux cités

Dans le cas d’un immeuble ou d’un site patrimonial cité, le conseil municipal peut dorénavant simplement établir ses orientations en vue de la préservation, de la réhabilitation et, le cas échéant, de la mise en valeur de ce bien en fonction de sa valeur patrimoniale et de ses éléments caractéristiques. Ces orientations n’ont donc plus à être désignées sous le vocable de « plan de conservation ». Elles doivent être adoptées par le conseil par résolution ou par règlement. Cependant, rien n’empêche une municipalité de rassembler ses orientations dans un document et de le nommer « plan de conservation ».

Paysages culturels désignés

Un plan de conservation est toujours requis pour qu’un territoire obtienne le statut de paysage culturel patrimonial désigné (LPC, art. 20). Son contexte d’utilisation est différent de celui des trois situations décrites précédemment. En effet, celui-ci doit faire mention du territoire concerné et décrire les usages économiques, sociaux et culturels ainsi que les mesures de protection et, le cas échéant, de mise en valeur du paysage. Il guide les mesures de planification territoriale et de réglementation d’urbanisme mises en œuvre par les organismes municipaux.

Politique de consultation et autres documents préparés par la ministre

Politique de consultation – La LPC prévoit dorénavant que la ministre de la Culture et des Communications élabore une politique de consultation (art. 11.1). Celle-ci vise à favoriser la participation des personnes ou des organismes concernés par les orientations à privilégier en matière de connaissance, de protection, de mise en valeur et de transmission du patrimoine culturel (LPC, art. 11.2).

Cette politique prévoit notamment un processus de consultation modulé en fonction des objets visés, des personnes ou des organismes consultés. Elle prévoit également la formation d’une table des partenaires et détermine sa composition, son fonctionnement et les sujets qui doivent être soumis à la consultation de ses membres. Selon les sujets abordés, des représentants du milieu municipal pourront être appelés à participer à cette table.

Autres documents – La LPC prévoit maintenant que la ministre élabore une méthode d’évaluation de l’intérêt patrimonial des biens, des éléments du patrimoine immatériel, des personnages historiques décédés, des événements et des lieux historiques ainsi qu’une grille de catégorisation des immeubles et des sites patrimoniaux classés (LPC, art. 11.1).

Ces mesures ne s’appliquent qu’aux pouvoirs de la ministre. Les municipalités n’auront pas à respecter la méthode lorsqu’elles exerceront leur pouvoir de citation ni à catégoriser les immeubles et les sites qu’elles ont cités. Toutefois, rien n’empêchera une municipalité de s’inspirer de ces outils si elle le souhaite. 

En outre, la catégorie d’un site patrimonial devra être prise en compte par la Ville de Québec et la Ville de Montréal dans l’exercice des pouvoirs de la ministre que la LPC leur confie (art. 179.1 et suivants).

Démolition des immeubles

La LAU a été modifiée de manière à resserrer le contrôle des démolitions par les municipalités locales.

Dorénavant, l’adoption et le maintien en vigueur d’un règlement de démolition par une municipalité locale et une MRC pour un territoire non organisé sont obligatoires (LAU, art. 148.0.2 et 76). Le règlement prévoit notamment qu’un comité composé de trois membres du conseil municipal analyse les demandes de démolition d’un immeuble au cas par cas à la lumière de critères, avec la possibilité d’imposer des conditions.

Certains changements au régime de démolition s’appliquent à l’ensemble des immeubles et d’autres, seulement aux immeubles patrimoniaux. Tel que la LAU le définit (art. 148.0.1), il s’agit des immeubles :

  • inscrits dans un inventaire du patrimoine réalisé par une MRC;
  • cités par une municipalité locale ou une MRC;
  • situés dans un site patrimonial cité par une municipalité locale ou une MRC.

Le règlement doit obligatoirement les viser.

Les changements décrits à la LAU sont en vigueur. Cependant, les mesures décrites seront seulement applicables lorsque les règlements de démolition conformes à ces nouvelles dispositions seront en vigueur.

Changements au règlement de démolition applicables à tous les immeubles

Critères d’analyse – Parmi les critères devant être considérés par le comité de démolition se trouve maintenant la valeur patrimoniale de l’immeuble – y compris pour les immeubles qui ne sont pas inventoriés, cités ou situés dans un site patrimonial cité. Elle réfère à sa valeur archéologique, architecturale, artistique, emblématique, ethnologique, historique, paysagère, scientifique, sociale, urbanistique ou technologique. 

En outre, les critères de détérioration de l’apparence architecturale et du caractère esthétique ont été supprimés, puisqu’ils sont compris dans celui de l’état de l’immeuble. Une municipalité peut néanmoins les introduire spécifiquement dans son règlement de démolition ou inclure tout autre critère.

Documents – Le règlement de démolition peut maintenant exiger que le propriétaire soumette une expertise ou un programme préliminaire de réutilisation du sol dégagé préalablement à l’étude de sa demande d’autorisation (LAU, art. 148.0.2.1). La Loi donne comme exemple d’expertise une étude patrimoniale. Il peut aussi s’agir d’expertises en matière de salubrité, d’intégrité du bâtiment, de vulnérabilité liée aux contraintes naturelles ou de travaux nécessaires pour une restauration patrimoniale du bâtiment. 

Le règlement peut exiger la production de ces documents après que le comité ait rendu une décision positive relativement à la demande d’autorisation de démolition, plutôt qu’avant l’étude de celle-ci. Dans ce cas, l’autorisation de démolition est conditionnelle à la confirmation de la décision du comité à la suite de l’analyse des documents. Cette mesure permet d’éviter au requérant leurs frais de production lorsque le comité est d’emblée défavorable à la demande.

Immeubles non visés et règles variables – Le règlement peut déterminer tout immeuble, autre que patrimonial, qui n’est pas assujetti à ses dispositions (LAU, art. 148.0.2.1). 

En outre, il peut définir des catégories d’immeubles et des parties de territoire, et prévoir des règles différentes pour chacune d’elles, en combinaison ou non. Par exemple, une municipalité peut décider de ne pas viser un parc industriel composé de bâtiments récents ou d’assujettir son noyau villageois à des critères additionnels.

Révision d’une décision – La LAU prévoyait la possibilité pour toute personne, dans les 30 jours de la décision du comité de démolition, d’interjeter appel de cette décision devant le conseil (ancien art. 148.0.19). Cette possibilité existe toujours, mais son nom a changé : la LAU évoque maintenant la révision d’une décision plutôt qu’un appel. 

De plus, le conseil peut, de son propre chef, réviser une décision du comité qui autorise la démolition d’un immeuble patrimonial

En révision, il peut rendre toute décision que le comité aurait pu rendre. Il peut empêcher la démolition, l’autoriser ou imposer des conditions qui n’étaient pas prévues dans l’autorisation initiale. Par exemple, le conseil pourrait confirmer la démolition, mais exiger que certaines composantes patrimoniales soient démontées et entreposées ou intégrées à la nouvelle construction (ex. vitrail, ornement sculpté, clocheton).

En outre, le règlement peut soustraire toute décision du comité de cette révision, à l’exclusion d’une autorisation de démolir un immeuble patrimonial. Il serait ainsi possible que le règlement ne permette pas de révision lorsque la décision porte sur un immeuble d’un certain type (ex. un entrepôt) ou secteur. De plus, le règlement peut prescrire les qualités requises pour demander la révision d’une décision du comité, sauf lorsqu’il s’agit de l’autorisation de démolir un immeuble patrimonial. Par exemple, une municipalité pourrait restreindre la possibilité de demander une révision au propriétaire de l’immeuble visé, à ses locataires ou aux voisins immédiats.

À noter que la révision se fait sur dossier. Le conseil n’est pas tenu de refaire l’exercice complet mené par le comité de démolition (ex. audition publique). Toutefois, par souci d’équité procédurale, il devrait donner l’occasion aux principales parties intéressées (le propriétaire et la personne ayant demandé la révision) de présenter leurs observations lors de la séance où il se saisira de la demande.

Lien avec la planification supralocale – Dans le document complémentaire de son SAD, une MRC peut dorénavant établir des règles et des critères dont les municipalités locales doivent tenir compte dans leur règlement de démolition (LAU, art. 6). Il peut s’agir, par exemple :

  • de critères additionnels à considérer lors de l’analyse d’une demande;
  • d’une catégorie de bâtiments ou de secteurs à assujettir au règlement;
  • du type de démolition visé par le règlement (ex. pour englober certaines démolitions partielles).

Processus d’adoption et d’entrée en vigueur – La LAU (art. 123) prévoit maintenant que le règlement de démolition est adopté ou modifié selon le processus prévu pour la majorité des règlements d’urbanisme. Ainsi, le conseil de la municipalité locale adopte d’abord un projet de règlement, lequel fait l’objet d’une assemblée publique de consultation (art. 124, 125). Puisqu’il n’est pas susceptible d’approbation référendaire, le conseil peut l’adopter après cette consultation, avec ou sans changement (art. 134). La conformité aux objectifs du SAD et aux dispositions du document complémentaire est ensuite examinée par la MRC (art. 137.2).

Exigences particulières pour les immeubles patrimoniaux

La LAU prévoit maintenant différentes dispositions spécifiques lorsque des immeubles patrimoniaux font l’objet d’une demande de démolition. Il s’agit des suivantes :

  • Avis public – Comme c’est le cas pour tous les immeubles, la municipalité est tenue d’afficher un avis facilement visible pour les passants sur l’immeuble visé par la demande de démolition (LAU, art. 148.0.5). De plus, elle doit faire publier un avis public de cette demande sans délai, ce qui est facultatif pour les immeubles non patrimoniaux. Une copie de cet avis doit être transmise sans délai à la ministre de la Culture et des Communications. Ceci lui permet d’intervenir plus tôt dans le processus, si elle le souhaite, pour protéger l’immeuble.

    Par ailleurs, une mesure transitoire prévoit également la transmission d’avis à la ministre.
  • Critères additionnels – Le règlement de démolition doit maintenant prévoir des critères propres à l’évaluation d’une demande d’autorisation relative à un immeuble patrimonial, incluant les suivants :
    • l’histoire de l’immeuble et sa contribution à l’histoire locale; 
    • son degré d’authenticité et d’intégrité; 
    • sa représentativité d’un courant architectural particulier;
    • sa contribution à un ensemble à préserver.
  • Audition publique – Le comité de démolition doit tenir une audition publique sur la demande de démolition. Cela est facultatif pour les immeubles non patrimoniaux (LAU, art. 148.0.7).
  • Consultation du conseil local du patrimoine – Si la municipalité est dotée d’un conseil local du patrimoine au sens de l’article 117 de la LPC, le comité de démolition doit le consulter avant de rendre sa décision (LAU, art. 148.0.10). 
  • Acquisition de l’immeuble – Une personne peut, tant que le comité n’a pas rendu sa décision, demander un délai afin d’entreprendre ou de poursuivre des démarches en vue d’acquérir un immeuble patrimonial faisant l’objet d’une demande de démolition pour en conserver le caractère patrimonial. Le comité peut alors reporter sa décision de deux mois à compter de la fin de l’audition pour permettre la conclusion des négociations. Cette possibilité existait antérieurement seulement pour les immeubles comprenant des logements locatifs (LAU, art. 148.0.8).
  • Pouvoir de révision par le conseil – Le conseil municipal peut, de son propre chef, dans les 30 jours suivant une décision du comité qui autorise la démolition d’un immeuble patrimonial, adopter une résolution exprimant son intention de réviser cette décision (LAU, art. 148.0.19). Comme mentionné précédemment, il n’est pas possible de soustraire une décision d’autoriser la démolition d’un immeuble patrimonial du pouvoir de révision ni de prescrire les qualités d’une personne pouvant demander cette révision. Ainsi, cette décision peut toujours faire l’objet d’une demande de révision par quiconque. 
  • Pouvoir de désaveu par la MRC – Lorsque le comité autorise la démolition d’un immeuble patrimonial et que sa décision n’est pas portée en révision ou lorsque le conseil municipal révise une décision du comité et autorise une telle démolition, le conseil de la MRC peut exercer un pouvoir de désaveu (LAU, art. 148.0.20.1). Cela lui permet d’empêcher la démolition. Avant d’exercer ce pouvoir, il peut consulter son conseil régional du patrimoine, s’il en a un.

    Pour lui permettre d’exercer son pouvoir, un avis de la décision du comité ou du conseil autorisant la démolition doit être notifié sans délai à la MRC. Il doit être accompagné de tous les documents produits par le propriétaire. Le conseil de la MRC a 90 jours à compter de la réception de l’avis pour désavouer la décision. En conséquence, aucun certificat d’autorisation de démolition ne peut être délivré avant ce délai à moins que la MRC avise la municipalité qu’elle n’entend pas se prévaloir de son pouvoir de désaveu.

    Dans les municipalités locales exerçant des compétences de MRC sur le territoire d’une agglomération, le pouvoir de désaveu est exercé par le conseil d’agglomération. Une exception est prévue pour Montréal et est possible pour Québec.
  • Amendes – La fourchette d’amendes prévue dans la LAU pour une démolition illégale n’est pas plus élevée lorsque l’immeuble est patrimonial : elle va de 10 000 $ à 250 000 $. L’amende maximale est toutefois de 1 140 000 $ dans le cas de la démolition par une personne morale d’un immeuble cité ou situé dans un site patrimonial cité. 

Immeubles protégés par la ministre ou le gouvernement

La ministre de la Culture et des Communications doit autoriser la démolition des immeubles qui sont :

  • classés (LPC, art. 48);
  • situés dans l’aire de protection d’un immeuble classé (LPC, art. 49);
  • situés dans un site patrimonial classé (LPC, art. 64);
  • situés dans un site patrimonial déclaré (LPC, art. 64).

Dans ces situations, pour être réalisée, leur démolition doit être autorisée par la ministre et la municipalité, laquelle applique sa réglementation sur la démolition.

La Loi n’oblige pas les municipalités à assujettir ces immeubles au règlement de démolition, à moins qu’ils figurent dans l’inventaire réalisé par la MRC (ce qui sera sans doute le cas).

Rôle du Tribunal administratif du logement

Auparavant, le Tribunal administratif du logement pouvait se prononcer sur la démolition d’un immeuble comprenant un logement à la demande d’un locataire, lorsque la municipalité n’était pas dotée d’un règlement de démolition adopté en vertu de la LAU (Loi sur le Tribunal administratif du logement, art. 32). Dans le contexte où ce règlement est maintenant obligatoire, le Tribunal conserve ce pouvoir seulement pour les immeubles qui ne seraient pas visés par le règlement.

Résolution de contrôle intérimaire

Il est maintenant possible tant pour une municipalité locale qu’une MRC d’empêcher la démolition d’un immeuble par une résolution de contrôle intérimaire (LAU, art. 62 et 112). Ceci peut être utile si l’un de ces organismes souhaite l’interdire sans attendre que le processus prévu par le règlement de démolition le lui permette. 

Particularités pour les villes de Québec et de Montréal

En vertu de leurs chartes respectives, certaines particularités caractérisent le régime de démolition des villes de Québec et de Montréal.

Ville de Québec – Le conseil de la ville est responsable d’adopter le règlement de démolition prévu par la LAU (Charte de la Ville de Québec, capitale nationale du Québec, art. 96 de l’annexe C). S’il le souhaite, il peut néanmoins déléguer à un conseil d’arrondissement la constitution du comité de démolition. Il peut également lui déléguer l’exercice du pouvoir de révision, auquel cas, le pouvoir de désaveu est exercé par le conseil de la ville. Si le pouvoir de révision est exercé par ce dernier, c’est le conseil d’agglomération qui peut désavouer une autorisation de démolir un immeuble patrimonial.

Par ailleurs, si le règlement de démolition le prévoit, la Commission d’urbanisme et de conservation de Québec peut exercer les pouvoirs du comité de démolition, en application des dispositions de la LAU. Ses séances seraient alors publiques. Même si la Charte encadre le territoire où la Commission a compétence (ex. les parties du territoire de la ville déterminées par le conseil de la ville possédant des caractéristiques architecturales, patrimoniales ou environnementales à préserver ou à mettre en valeur), elle peut agir comme comité de démolition à l’égard de toute partie du territoire de la ville ou de toute catégorie d’immeuble déterminée par le règlement.

Ville de Montréal – Comme c’était le cas auparavant, les conseils d’arrondissement sont responsables d’adopter le règlement de démolition prévu par la LAU (Charte de la Ville de Montréal, métropole du Québec, art. 169 de l’annexe C). De plus, ce sont toujours les comités consultatifs d’urbanisme des arrondissements qui agissent comme comités de démolition. Les nouvelles dispositions de la LAU s’appliquent.

Le conseil de la ville peut maintenant prévoir dans le document complémentaire du plan d’urbanisme des règles et des critères dont doivent tenir compte, dans tout règlement de démolition, les conseils d’arrondissement. Il peut les obliger à y prévoir des dispositions au moins aussi contraignantes que celles établies dans le document (Charte, art. 88). Une règle similaire est prévue dans la LAU pour le document complémentaire du SAD des MRC. 

Finalement, le pouvoir de désaveu peut être exercé par le conseil de la ville. C’est toutefois le conseil d’agglomération qui peut l’exercer lorsque l’autorisation de démolir un immeuble patrimonial provient d’une municipalité liée autre que la Ville de Montréal.

Délai pour adopter le règlement de démolition et mesures transitoires

Toute municipalité locale doit adopter un règlement de démolition conforme aux nouvelles dispositions de la LAU avant le 1er avril 2023, soit deux ans après la sanction de la Loi (art. 137). Si un règlement est déjà en vigueur, la municipalité a le même délai pour le rendre conforme aux nouvelles dispositions. Il demeure en vigueur jusqu’à ce que ce soit fait (art. 141).

Une mesure transitoire s’applique dans une municipalité locale jusqu’à ce qu’un tel règlement soit en vigueur et qu’un inventaire ait été adopté pour son territoire (art. 138). Dans ce cas, elle doit, au moins 90 jours avant la délivrance d’un permis ou d’un certificat d’autorisation relatif à la démolition d’un immeuble construit avant 1940, notifier à la ministre de la Culture et des Communications un avis de son intention accompagné de tout renseignement ou document requis par cette dernière. Un tel avis n’est pas nécessaire si l’immeuble date de 1940 ou après, même s’il est susceptible de présenter une valeur patrimoniale.

En outre, tant qu’un règlement de démolition conforme aux nouvelles dispositions de la LAU n’est pas en vigueur, la démolition des immeubles cités ou situés dans un site patrimonial cité continue d’être assujettie aux dispositions de la LPC (art. 139). En conséquence, c’est le conseil municipal qui traite la demande de démolition (LPC, art. 141). Il doit, à cette fin, consulter le conseil local du patrimoine. 

Les mesures transitoires décrites dans les paragraphes précédents peuvent se combiner. Ainsi, la démolition d’un immeuble construit avant 1940 qui est cité ou situé dans un site patrimonial cité est traitée par le conseil municipal après consultation du conseil local du patrimoine et un avis doit être transmis à la ministre.

Ces indications s’appliquent également à une MRC qui agit comme municipalité locale dans un territoire non organisé. À l’exception de la démolition d’un immeuble cité ou situé dans un site patrimonial cité, elles s’appliquent également à un arrondissement de la Ville de Montréal.

Entretien des bâtiments

La LAU a été modifiée de manière à resserrer le contrôle de l’entretien des bâtiments par les municipalités locales. Des modifications s’appliquent spécifiquement aux immeubles patrimoniaux.

Dorénavant, l’adoption et le maintien en vigueur d’un règlement sur l’occupation et l’entretien des bâtiments par une municipalité locale sont obligatoires ainsi que par une MRC agissant comme municipalité locale dans un territoire non organisé (LAU, art. 145.41 et 76). Ce règlement prévoit notamment qu’elles peuvent établir des normes et prescrire des mesures à cet effet, en plus d’exiger des travaux et requérir l’inscription d’un avis de détérioration de l’immeuble sur le registre foncier.

Immeubles visés – Le règlement doit minimalement viser les immeubles patrimoniaux, soit les mêmes que ceux faisant l’objet de mesures particulières dans le régime de démolition. Il s’agit de ceux :

  • inscrits dans un inventaire du patrimoine réalisé par une MRC;
  • cités par une municipalité locale ou une MRC;
  • situés dans un site patrimonial cité par une municipalité locale ou une MRC.

Hormis ces derniers, le règlement peut déterminer tout immeuble qui n’est pas assujetti. En outre, il peut définir des catégories d’immeubles et des parties de territoire, et prévoir des règles différentes pour chacune d’elles en combinaison ou non. Ainsi, une municipalité pourrait assujettir les bâtiments résidentiels à des normes différentes de celles des bâtiments industriels ou prévoir des normes plus nombreuses ou plus sévères pour son secteur touristique.

Normes – Le règlement doit dorénavant contenir des normes visant à empêcher le dépérissement des bâtiments, à les protéger contre les intempéries et à préserver l’intégrité de leur structure (LAU, art. 145.41). Il peut s’agir par exemple d’obliger le propriétaire à réparer une toiture qui fuit, à reconstruire des murs écroulés, à remplacer les pièces de charpente dégradées ou à éliminer les moisissures rapidement. 

Il s’agit de normes minimales, la municipalité locale peut en prévoir d’autres dans son règlement. Par ailleurs, elles ne visent pas spécifiquement le maintien des caractéristiques patrimoniales des immeubles. La municipalité locale peut prévoir des règles en ce sens si elle le souhaite ou citer l’immeuble ou encore le site concerné.

Pouvoir d’expropriation – La LAU (art. 145.41.5) prévoyait déjà qu’une municipalité locale ayant un règlement sur l’occupation et l’entretien des bâtiments pouvait exproprier un immeuble lorsqu’il possédait les caractéristiques suivantes :

  • un avis de détérioration a été inscrit à son égard au registre foncier depuis au moins 60 jours;
  • la municipalité a exigé des travaux sur l’immeuble, mais ils n’ont pas été effectués;
  • au moins une des deux situations suivantes s’applique :
    • il est vacant depuis au moins un an;
    • son état de vétusté ou de délabrement présente un risque pour la santé ou la sécurité des personnes.

Ce pouvoir est conservé. Toutefois, dans l’objectif d’éviter la dégradation des immeubles patrimoniaux, une municipalité locale peut les exproprier même s’ils ne sont pas vacants depuis au moins un an et que leur état de vétusté ne présente pas de risque. Un avis de détérioration inscrit depuis 60 jours et des travaux exigés non effectués sont des conditions qui doivent néanmoins être respectées pour qu’il y ait expropriation.

Amendes – Auparavant, une infraction au règlement sur l’occupation et l’entretien des bâtiments était punissable de la peine prévue dans les lois municipales générales pour des maximums allant de 1 000 $ à 4 000 $ selon que l’infraction était commise par une personne physique ou morale, ou qu’elle était une première offense ou une récidive (Code municipal du Québec, art. 455; Loi sur les cités et villes, art. 369).

La LAU prévoit maintenant que la peine maximale pour une infraction à ce règlement est de 250 000 $ (LAU, art. 145.41.6). La même peine est applicable en cas de démolition illégale d’un bâtiment. L’objectif étant de viser les situations où la négligence d’entretien rend la démolition pratiquement inévitable, aussi appelées la démolition par abandon. Par ailleurs, le propriétaire d’un bâtiment peut commettre plusieurs infractions dues à un défaut d’entretien; les peines peuvent donc se cumuler.

Étant donné la grande diversité d’infractions pouvant être visées par le règlement, la LAU ne fixe pas d’amende minimale. Les municipalités locales peuvent établir des fourchettes d’amendes adaptées aux infractions et, si elles le souhaitent, distinctes pour les personnes morales et les récidivistes.

Dans le contexte où ces fourchettes peuvent être comprises dans un intervalle considérable (de 1 $ à 250 000 $, avec possibilité de cumul de peines), la LAU prévoit des facteurs aggravants dont un juge doit tenir compte dans la détermination des peines (art. 145.41.7). Il s’agit des suivants :

  • le fait que le contrevenant ait agi intentionnellement ou ait fait preuve de négligence ou d’insouciance;
  • la gravité de l’atteinte ou le risque d’atteinte à la santé ou à la sécurité des personnes;
  • l’intensité des nuisances subies par le voisinage;
  • le caractère prévisible de l’infraction ou le défaut d’avoir donné suite aux recommandations ou aux avertissements visant à la prévenir, notamment, lorsque les travaux exigés par la municipalité ou décrits dans un avis de détérioration n’ont pas été réalisés;
  • le fait que le bâtiment concerné soit un immeuble patrimonial au sens du chapitre sur la démolition;
  • le fait que les actions ou omissions du contrevenant aient entraîné une telle détérioration du bâtiment que le seul remède utile consiste en sa démolition;
  • les tentatives du contrevenant de dissimuler l’infraction ou son défaut de tenter d’en atténuer les conséquences.

Le juge qui, en présence d’un facteur aggravant, impose tout de même une amende minimale doit motiver sa décision. 

Finalement, une municipalité peut imposer au nouveau propriétaire d’un immeuble l’amende applicable en cas de récidive, lorsque celui-ci était, au moment de l’acquisition, visé par un avis de détérioration.

Lien avec la planification supralocale – Dans le document complémentaire de son SAD, une MRC peut dorénavant établir des règles et des critères dont les municipalités locales doivent tenir compte dans leur règlement sur l’occupation et l’entretien des bâtiments (LAU, art. 6). Il peut s’agir par exemple de normes additionnelles ou d’une catégorie de bâtiments ou de secteurs à assujettir au règlement.

Processus d’adoption et d’entrée en vigueur – La LAU (art. 123) prévoit maintenant que le règlement sur l’occupation et l’entretien des bâtiments est adopté ou modifié selon le processus prévu pour la majorité des règlements d’urbanisme. Ainsi, le conseil de la municipalité locale adopte d’abord un projet de règlement, lequel fait l’objet d’une assemblée publique de consultation (art. 124, 125). Puisqu’il n’est pas susceptible d’approbation référendaire, le conseil de la municipalité peut l’adopter après cette consultation, avec ou sans changement (art. 134). La conformité aux objectifs du SAD et aux dispositions du document complémentaire est ensuite examinée par la MRC (art. 137.2).

Délai pour adopter le règlement sur l’occupation et l’entretien des bâtiments et mesure transitoire

Les municipalités ont jusqu’au 1er avril 2026 pour adopter un règlement sur l’occupation et l’entretien des bâtiments conformes aux nouvelles dispositions de la LAU, soit cinq ans après la sanction de la Loi (Loi, art. 137). Ce délai est identique à celui laissé aux MRC pour réaliser l’inventaire du patrimoine immobilier, puisque les bâtiments inventoriés seront assujettis au règlement. Tout règlement en la matière adopté en vertu des anciennes dispositions de la LAU demeure en vigueur jusqu’à ce qu’il soit modifié, remplacé ou abrogé (Loi, art. 141).

Entrée en vigueur

La majorité des dispositions de la Loi sont entrées en vigueur le jour de sa sanction, soit le 1er avril 2021 (Loi, art. 143). C’est le cas des dispositions décrites dans ce Muni-Express, à l’exception des mesures suivantes. Le pouvoir de la ministre de la Culture et des Communications de viser des immeubles plus récents à inventorier par les MRC entrera en vigueur le 1er avril 2026. Ceci permettra aux MRC de réaliser un premier inventaire avec un corpus défini.

Parmi les autres dispositions qui entrent en vigueur ultérieurement, certaines concernent notamment le pouvoir de la ministre de classer des immeubles et des sites patrimoniaux, ce qui n’affecte pas la majorité des municipalités (ex. grille de catégorisation des immeubles et des sites patrimoniaux classés). La Ville de Québec et la Ville de Montréal, qui exercent des pouvoirs de la ministre en vertu des articles 179.1 et suivants de la LPC, sont néanmoins concernées.


Ministère des Affaires municipales et de l’Habitation
10, rue Pierre-Olivier-Chauveau
Québec (Québec) G1R 4J3
Téléphone : 418 691-2015

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