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Guide La prise de décision en urbanisme

Règlements d'urbanisme et droits acquis

Mise en garde : Le Ministère travaille actuellement à la révision exhaustive du guide La prise de décision en urbanisme.

En conséquence, les fiches du guide ne reflètent pas nécessairement les modifications les plus récentes apportées à la LAU et aux autres lois municipales, entre autres, par la Loi modifiant la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme et d’autres dispositions Ouverture d'un document PDF dans une nouvelle fenêtre (628 Ko)
(2023, chapitre 12).

Merci de votre compréhension.

Les règlements de zonage et de lotissement incluent des dispositions qui permettent aux municipalités de régir les constructions, les usages, les enseignes et les lots dérogatoires protégés par des droits acquis.

Utilité

Dès l'entrée en vigueur d'un règlement d'urbanisme ou d'un amendement à ce dernier, aucun permis ou certificat ne peut être émis si les dispositions contenues dans ce règlement ne peuvent être respectées. Tous les nouveaux lots, constructions, enseignes ou usages devront donc se conformer à cette réglementation.

Que se passe-t-il alors dans le cas des lots, des constructions, des usages et des enseignes existants ou déjà autorisés et rendus dérogatoires, c'est-à-dire non conformes aux dispositions de cette nouvelle réglementation? Ceux-ci bénéficient de certains droits que l'on appelle droits acquis. Il faut noter que dérogatoire n'est pas synonyme d'illégal.

Le droit acquis à l'égard d'un lot, d'une construction, d'un usage ou d'une enseigne permet de maintenir une situation de fait et d'en jouir, même si cette situation n'est plus conforme à la nouvelle réglementation d'urbanisme. La reconnaissance du droit acquis est basée sur un principe qui établit que, de façon générale, les lois et règlements ne sont pas rétroactifs, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent porter atteinte aux situations existantes avant leur entrée en vigueur, à moins que la loi ne le spécifie.

Or, une municipalité peut trouver utile de régir les lots, les constructions, les usages, et les enseignes dérogatoires protégés par droits acquis en adoptant des règles particulières.

Une réglementation sur le sujet aura pour avantage, d'une part, de clarifier les règles de droits acquis et de faciliter le règlement des litiges lorsqu'un droit acquis est revendiqué lors d'une demande de permis. D'autre part, elle permettra de favoriser l'élimination des situations nuisibles.

Par exemple, le conseil municipal peut souhaiter empêcher ou limiter l'expansion de certains usages, tel un usage industriel devenu dérogatoire après l'adoption d'une nouvelle réglementation d'urbanisme. Ainsi, le conseil peut signifier dans son règlement de zonage qu'il est interdit d'étendre un tel usage dérogatoire. Il peut également permettre une expansion tout en posant certaines conditions en précisant, par exemple, le pourcentage d'expansion possible par rapport à la superficie déjà occupée par l'usage industriel.

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Caractéristiques

Dans ce domaine les principaux pouvoirs habilitants se trouvent aux articles 113, 115, 118, 256.1 à 256.3 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Une municipalité peut adopter des dispositions dans un règlement de zonage, de lotissement et de construction, selon le cas, de manière à :

  • interdire l'extension ou la modification d'un usage ou d'une construction dérogatoire ou établir les conditions en vertu desquelles ceux-ci peuvent être étendus ou modifiés;
  • exiger que cesse un usage dérogatoire, si cet usage a été abandonné, a cessé ou a été interrompu pour une période de temps qu'elle définit et qui doit être raisonnable compte tenu de la nature de l'usage, mais qui, en aucun cas, ne doit être inférieure à six mois;
  • stipuler qu'une construction ou un usage dérogatoire ne peut être remplacé par une autre construction ou un autre usage dérogatoire.
  • On ne peut remplacer un usage dérogatoire par un autre usage dérogatoire (p. ex. transformer une boulangerie en restaurant ou un entrepôt en garage). Cependant, on peut le remplacer par un usage que la réglementation permet, et ce, à condition d'obtenir un certificat d'autorisation. Par contre, si la modification n'altère pas l'essence de l'usage et qu'elle correspond à un agrandissement ou à une diminution de la surface utilisée, ou encore correspond à une amélioration ou à une meilleure utilisation des locaux, la modification est possible, mais ce, toujours dans le respect de la réglementation en vigueur.
  • ordonner que la reconstruction ou la réfection de tout bâtiment détruit, dangereux ou qui a perdu au moins la moitié de sa valeur, soit effectuée en conformité avec les règlements d'urbanisme en vigueur (zonage, lotissement, construction, conditions d'émission des permis de construction);
  • prévoir, par zone, au règlement de lotissement les conditions particulières d'implantation applicables aux constructions et aux usages sur les lots dérogatoires;
  • réglementer, par zone, la construction, l'installation, le maintien, la modification et l'entretien de toute affiche, panneau-réclame ou enseigne déjà érigée;
  • régir ou restreindre par zone la construction, l'installation, la modification, l'entretien et le maintien d'auvents;
  • établir des catégories de constructions et d'usages dérogatoires protégés par des droits acquis en décrétant des règles qui varient selon les catégories;
  • établir les conditions relatives à l'agrandissement ou à la modification d'un lot dérogatoireOuverture d'une fenêtre contextuelle.

En l'absence de telles dispositions réglementaires dans la municipalité, il faut se référer à la jurisprudence qui établit, par exemple :

  • que le droit acquis est limité à l'usage et à la construction existante avant l'entrée en vigueur du nouveau règlement et qu'on ne peut accroître une utilisation dérogatoire au point de créer un usage différent (voir notes sur l'extension d'un droit acquisOuverture d'une fenêtre contextuelle);
  • que les droits acquis à un usage se perdent s'il y a abandon, cessation ou changement de l'usage dérogatoire;
  • que le droit acquis à une construction peut se perdre si cette construction est détruite ou dangereuse.

Une municipalité peut toutefois préciser ses intentions en matière de droits acquis dans son règlement de zonage.

Ce qui confère également un droit acquis

  • Construction en cours et droit acquis :
    Une construction déjà commencée après l'obtention d'un permis, mais pas nécessairement complétée, possède un droit acquis en vertu de ce permis.
  • Permis de construction et droit acquis :
    Un permis de construction obtenu avant une interdiction, mais dont la construction n'a pas débuté, confère un droit acquis. Cependant, les conditions du permis doivent être respectées, incluant, s'il y a lieu, le délai fixé pour entreprendre cette construction.
  • Permis de lotissement et droit acquisOuverture d'une fenêtre contextuelle :
    Un permis de lotissement visant à une opération cadastrale et obtenu avant une interdiction confère un droit acquis à cette opération.
  • Usage dérogatoire et droit acquis :
    Un usage dérogatoire exercé sur un terrain ou à l'intérieur d'un bâtiment possède un droit acquis, mais celui-ci se limite à la superficie utilisée et non à l'ensemble du terrain ou à l'ensemble de la superficie du bâtiment. Dans ce cas aussi, un permis ou un certificat obtenu avant une interdiction confère un droit acquis.

Non-existence de droits acquis

  • Permis ou certificat illégaux:
    Un permis ou un certificat accordé illégalement ne crée aucun droit acquis. Même s'il y a eu tolérance de la part des autorités municipales, aucun droit acquis ne procède d'une construction, d'une utilisation du sol ou d'un immeuble, d'un lotissement effectués illégalement.

    En principe, il est possible qu'un arpenteur enregistre un lot au Service du cadastre sans que ce lot ait été approuvé préalablement par la municipalité. Dans un tel cas, si le lot est non conforme au règlement de lotissement, il est considéré comme dérogatoire et non protégé par des droits acquis. En vertu de l'article 228 LAU, une municipalité peut demander à la Cour supérieure l'annulation de toute opération cadastrale non conforme au règlement de lotissement.

Fardeau de la preuve

Le fardeau de la preuve revient toujours à la personne qui prétend jouir d'un droit acquis. En l’occurrence, si une municipalité refuse d’émettre un permis ou un certificat reconnaissant l’existence de droits acquis et que le demandeur prétend pour sa part qu’il possède un tel droit, c’est à lui à aller devant un tribunal et à prouver qu’il en possède un.

En cette matière, la responsabilité de l’arpenteur géomètre est de constater si le terrain qui deviendra lot à la suite de son travail d’arpenteur est ou sera conforme ou non à la réglementation en vigueur. Celle du notaire est de vérifier la légalité des titres de propriété ou encore de vérifier si le demandeur est conforme à la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA), si la propriété est située en zone agricole. Dans ce dernier cas, le notaire peut demander une copie de la déclaration de droit acquis que la personne fait en vertu des articles 101 ou 103 de cette loi.

Règles particulières

  • La Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles confère toute une série de droits acquisOuverture d'une fenêtre contextuelle lorsqu'une personne veut aliéner, lotir et utiliser à une fin autre que l'agriculture un lot situé dans une région agricole désignée. Mentionnons toutefois que les droits acquis reconnus par cette loi n'ont pas pour effet d'annuler la réglementation municipale en ce domaine.
  • Dans le cas des usages d'extraction tels que les carrières, les sablières et les tourbières, restreindre le droit acquis à la superficie exploitée enlèverait toute la portée du droit acquis. C'est pourquoi la jurisprudence limite l'extension du droit aux lots adjacents acquis avant l'entrée en vigueur du règlement interdisant l'usage, présumant que ceux-ci ont été acquis à des fins d'extraction. La Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles limite toutefois ce droit à un hectare dans une zone agricole.
  • Par ailleurs, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme accorde, dans certains cas spécifiés aux articles 256.1, 256.2 et 256.3, un privilège au lotissementOuverture d'une fenêtre contextuelle à des terrains non cadastrés ne pouvant respecter les normes de superficie ou de dimensions prévues dans un règlement de contrôle intérimaire ou dans un règlement de lotissement.
  • Un droit acquis se rattache à l'immeuble et non au propriétaire de cet immeuble. Par conséquent, un immeuble protégé par droits acquis conserve ses droits même s'il est loué ou vendu à un autre propriétaire (le même principe s'applique pour un usage).
  • L'existence d'un droit acquis sur un bâtiment ou un usage dérogatoire permet à son propriétaire de continuer à jouir de sa propriété et l'autorise à l'entretenir et à y faire les réparations nécessaires.
  • Un propriétaire ne saurait invoquer des droits acquis en matière de nuisances.
  • Les municipalités possèdent le pouvoir d'amortir les droits acquis en regard de l'affichage et des constructions fortifiées. En effet, la loi autorise une municipalité à annuler graduellement des droits acquis en prévoyant la disparition des enseignes non conformes. Il en est de même pour le pouvoir qui lui permet d'exiger la réfection d'une construction fortifiée lorsqu'elle juge, par règlement, qu'une telle fortification n'est pas justifiée en regard de l'usage qui en est fait. Enfin, certaines villes possèdent de par leur charte le pouvoir d'amortir sans indemnité les droits acquis pour certains usages et certaines constructions (p. ex. les établissements à caractère érotique, les antennes, les auvents).

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Références

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